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Le NCLEX-RN soumis à l’examen

  
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La mise en œuvre de l’examen et le sens à donner aux premiers résultats ne font pas l’unanimité

nov. 03, 2015, Par: Susan Pennell-Sebekos
textbooks and a stethoscope
iStockphoto

Voilà presque un an que le nouvel examen d’entrée dans la profession, le NCLEX-RN, est en place, et les résultats préliminaires sont troublants pour les étudiants, les enseignants et les organismes de réglementation.

En 2011, le Conseil canadien des organismes de réglementation de la profession infirmière (CCORPI) a annoncé que le National Council of State Boards of Nursing, Inc. (NCSBN), un organisme américain, commencerait à administrer le NCLEX à compter du 1er janvier 2015. Les diplômés en sciences infirmières de tous les territoires et de toutes les provinces (sauf le Québec) doivent réussir le NCLEX pour obtenir leur accréditation et leur enregistrement.

« C’est après une demande de propositions que les organismes de réglementation de la profession infirmière au Canada ont décidé d’utiliser le NCLEX-RN, a déclaré la présidente du CCORPI, Anne Coghlan. Le NCLEX-RN satisfaisait à toutes nos exigences pour un examen d’entrée dans la profession. De plus, des recherches poussées pour comparer les pratiques à l’entrée dans la profession au Canada et aux États-Unis ont montré qu’elles étaient similaires. »

Le NCLEX est un test adaptatif par ordinateur (TAO), un système électronique qui s’adapte au niveau d’aptitude de chaque candidat, au fur et à mesure qu’il répond aux questions. Le système évalue la performance des candidats pour chaque question avant de générer la suivante. Les examens ne sont donc jamais identiques. D’après le site Web du NCSBN, le TAO génère des questions moins « faciles » pour les candidats qui possèdent de grandes compétences et des questions moins « difficiles » pour ceux dont les compétences sont limitées. On évite ainsi que les candidats répondent au hasard aux questions trop difficiles, ce qui pourrait fausser les résultats. « Le nombre de questions auxquelles répond une personne est déterminé par le temps que met l’algorithme du TAO à confirmer que les réponses de cette personne la placent systématiquement au-dessus de la norme de passage, explique Mme Coghlan. Le nombre minimum de questions nécessaire pour arriver à cette conclusion est 75, et le nombre maximum que l’on peut poser est 265. »

Pendant les trois années qui se sont écoulées entre l’annonce du changement et la mise en place de l’examen, le CCORPI et le NCSBN ont travaillé avec des formateurs et leur ont donné accès au matériel pédagogique nécessaire pour qu’ils soient en mesure de préparer les étudiants à l’examen, explique Mme Coghlan.

Néanmoins, ceux qui ont passé l’examen pendant les six premiers mois voient d’un autre œil la façon dont le changement a été mis en œuvre. « Quand on nous a annoncé, au cours de notre deuxième année, que nous passerions le NCLEX, j’ai honnêtement eu le sentiment que les professeurs étaient aussi surpris que nous », confie la diplômée albertaine Christine Blacquière.

« Ces quatre dernières années, on nous a enseigné un programme conçu pour [l’ancien examen], et à la dernière minute, on a dû passer un autre examen, conçu dans un autre pays, pour un autre programme, déplore Nikki Doherty, diplômée de la C.-B. Quand nous avons souligné des problèmes flagrants dans les examens sur l’exercice de la profession, on nous a clairement dit, pour les nombreuses questions sur les spécialités qui nous étaient posées sans que ces sujets nous aient été enseignés, que nous n’avions qu’à faire de notre mieux pour répondre. »

Mme Doherty affirme que la documentation de préparation incluait de l’information sur la législation et les organismes gouvernementaux et américains ainsi que des questions sur les assurances privées, l’interprétation des ECG, la guerre biologique, les soins adaptés à la culture des principaux groupes minoritaires des États-Unis, la pharmacologie et des spécialisations comme la maternité, la pédiatrie et l’oncologie.

Mme Coghlan n’est pas d’accord avec les critiques qui qualifient le NCLEX d’examen américanocentrique et soutient que les organismes de réglementation et d’enseignement et le personnel infirmier ont collaboré pour élaborer l’examen actuel. « Le NCLEX n’est ni américain ni canadien : c’est un examen de sciences infirmières. Sa fonction n’est pas d’évaluer les connaissances sur un système de soins de santé particulier, son histoire ou sa réglementation. Sa fonction est de déterminer si les candidats à la profession ont les connaissances, les compétences et le discernement nécessaires pour fournir des soins au public en toute sécurité. »

Des taux de réussite étonnamment bas

Le 1er septembre, les résultats à l’examen administré pendant les six premiers mois ont été publiés pour l’ensemble du Canada et pour chaque province et territoire. Le taux de réussite national était de 70,6 %, soit une baisse de plus de 10 % par rapport aux années précédentes. Il était aussi inférieur de 8 % par rapport au taux de réussite obtenu aux États-Unis.

« Il est clair que les taux de réussite préliminaires suscitent des inquiétudes », avance Dawn Tisdale, présidente de l’Association des étudiant(e)s infirmier(ère)s du Canada (AEIC).

« Je crois que tous les responsables des politiques en matière de soins de santé se demandent comment nous en sommes arrivés là ou si nous avons assez réfléchi à la question, estime pour sa part Linda Silas, présidente de la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et d’infirmiers.

Comme il est encore tôt, il est important de mettre les résultats préliminaires en perspective. « Ces données sont pour les six premiers mois de l’année, et dans certaines provinces et certains territoires, elles proviennent d’un nombre restreint de candidats, nuance Mme Coghlan. Quand on lance un nouvel examen, on observe souvent des variations dans les résultats avant que les enseignants et les étudiants ne s’habituent aux exigences et à la structure du nouvel examen. »

Elle ajoute que les candidats canadiens qui repassent l’examen réussissent mieux que les diplômés américains, mais on n’a pas encore de données précises sur ce point.

En français

Mme Tisdale souligne une préoccupation particulière au Canada. L’AEIC rapporte « l’indignation des étudiantes et étudiants francophones parmi ses membres, nombreux à critiquer la qualité de la traduction et le manque de guides d’étude en français, ce qui les désavantageait ».

La directrice générale de l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières, Cynthia Baker, en appelle à des mesures pour améliorer la qualité de l’examen français. « Ce qui est en cause, c’est le respect de la Charte des droits. »

Le Nouveau-Brunswick, qui compte le plus de diplômés francophones, a aussi obtenu le taux de réussite le plus bas, soit 54,3 %. Sur les 265 candidats à l’examen, seulement 144 ont réussi; par comparaison, en Nouvelle-Écosse, ils ont été 205 sur 254 à réussir, soit 80,7 %.

Là où le nombre de candidats est faible à la fin du premier trimestre, le taux de réussite pourrait aisément changer d’ici la fin de l’année, croit Mme Coghlan. One ne connaîtra pas le nombre d’examens administrés en anglais et en français avant de disposer des données pour une année complète.

Mme Coghlan confirme que les organismes de réglementation continuent de collaborer avec une équipe canadienne de traduction composée de membres bilingues des personnels infirmier et éducatif, qui examinent continuellement les questions de l’examen pour veiller à leur équivalence dans les deux langues. Les plans de test et autre matériel pédagogique que les candidats pourraient trouver utiles pour le NCLEX ont été traduits. Le CCORPI travaille avec le NCSBN pour déterminer si d’autres documents devraient l’être aussi.

En attendant que le problème de traduction soit réglé, l’AEIC aimerait que les francophones soient autorisés à passer l’examen plus de trois fois, soit le nombre maximum actuel, fait valoir Mme Tisdale.

Impact des résultats

La directrice générale en apprentissage et pratique professionnelle de la Nova Scotia Health Authority Central Zone, Mary Ellen Gurnham, trouve avantageux de proposer plusieurs dates aux étudiants pendant l’année, mais se demande si beaucoup de diplômés ne remettent pas l’examen à plus tard par peur d’un format qu’ils ne connaissent pas, préférant attendre que les imperfections éventuelles du système soient corrigées.

« L’impact [de l’examen] sera ressenti dans tout le système », s’inquiète Mme Silas. Avec 25 % des effectifs infirmiers sur le point de partir à la retraite, la sécurité du public pourrait être compromise si moins de diplômés sont autorisés à entrer dans la profession, ou s’il leur faut plus de temps.

« Ce [retard et cette confusion] ont un coût sur le plan humain et pour le système, affirme Mme Baker. Dans le domaine de la santé, notre profession est la seule au Canada à ne pas avoir d’examen national. Je doute que confier l’accréditation de professionnels de la santé à un organisme de réglementation étranger soit dans l’intérêt supérieur des Canadiens. »

Et maintenant?

Reconnaissant que tout changement apporte son lot de difficultés et que des améliorations sont possibles, Mme Coghlan promet que le CCORPI et les organismes de réglementation continueront à travailler avec les enseignants pour comprendre la grande variation des résultats. « Peut-être y a-t-il des choses à apprendre pour améliorer la performance là où les taux de réussite sont inférieurs à la moyenne nationale. » Le CCORPI et les organismes de réglementation « continueront à veiller à ce que les enseignants et les étudiants soient au courant des ressources à leur disposition, [et] les infirmières et infirmiers canadiens continueront de participer à l’élaboration des examens et à leur révision. »

Et c’est là l’essentiel, le côté positif si l’on veut : les organismes de réglementation et les enseignants discutent des changements à apporter. « Dans chaque province et territoire, les organismes de réglementation s’organiseront pour travailler avec les parties concernées lorsque nécessaire, affirme Mme Coghlan. En tant que conseil national, le CCORPI continuera de s’assurer que les provinces et les territoires disposent de renseignements exacts sur l’examen et sur les données concernant son administration. »

« Le public, les infirmières et infirmiers étudiants, les gouvernements et les employeurs peuvent être assurés que la profession infirmière surveille la situation de près et collaborera avec tous les groupes concernés pour résoudre le problème », affirme Karima Velji, présidente de l’AIIC.

Mme Gurnham ne voit aucun intérêt à chercher des coupables et se félicite de la possibilité de collaborer. « Nous devons exercer notre leadership ensemble et trouver des solutions, nous devons donner l’exemple de la coopération professionnelle que nous demandons à notre personnel infirmier soignant. Parce que nous souhaitons tous le succès de la relève. »


Susan Pennell-Sebekos est journaliste indépendante dans la région du Niagara.

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